Tu marches.
Dans les faubourgs où s’écrase le bleu du soir, où les passants se touchent en coude à coude aveugle.
L’instant d’avant la danse et le doute, oui, souviens-toi.
On sort les lampions, on boute les saisons, on dit que l’on est encore là, que l’on sera toujours là.
Les néons embrasent les vitres des voitures, les néons te suivent et reconquièrent le jour, encore un peu, encore plus fort.
Tu marches avec un four.
Et tout le monde te regarde et tu ne regardes personne, le monde en goguette dans un dé à coudre indien.
A ton passage, les gens crient, lèvent les bras, s’enlacent et s’aiment, hurlent,
cassent des verres pour éloigner les esprits, se frottent les yeux et cravachent le crépuscule.
Tu marches avec un four dans tes bras.
Le feu en devenir, le métal sur ta poitrine, le temps refroidi.
Un four qui brûle le lambeau de certitudes froides qui me sert de manteau. Une flamme sèche qui secoue mes os et saccade ma peau.
Tu marches avec ta cadence de muscade, l’océan que tu aspires derrière toi, les embruns qui éclatent en noisettes et le sel dans tes cheveux.
Les nuages s’affalent et, pour la première fois, se demandent où ils sont. Tu les perds, tu les gagnes.
Tu es le temps. Le temps qui marche.